Le juge Edouard Levrault,lors de l’ouverture du procès du garde des sceaux Eric Dupond-Moretti,devant la Cour de justice de la République,à Paris,le 6 novembre 2023. FRANCK DUBRAý / PHOTOPQR /OUEST FRANCE / MAXPPP La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est refusée,le 25 juillet,à émettre la moindre réserve sur les curiosités du système judiciaire monégasque,dont un juge d’instruction français a fait les frais en 2019. L’affaire était pourtant remontée jusqu’au président de la République et avait provoqué un léger incident diplomatique avec Monaco. Le juge a saisi,mercredi 7 août,la Grande Chambre,l’instance suprême de la CEDH.
Edouard Levrault a été détaché en 2016 à Monaco pour trois ans,renouvelable une fois – le renouvellement n’est pas un droit,mais un usage habituel sur le Rocher. En décembre 2018,le directeur des services judiciaires de Monaco (l’équivalent du ministre de la justice) lui assure qu’il est favorable à son renouvellement,mais fait brutalement volte-face six mois plus tard,le 24 juin 2019,en indiquant sobrement que ses décisions « n’ont pas à être motivées ».
C’est que le juge Levrault s’est intéressé d’un peu trop près au milliardaire russe,et président de l’AS Monaco,Dmitri Rybolovlev,inculpé pour corruption active et trafic d’influence. Avait suivi la mise en examen de notables monégasques,dont le directeur de la police judiciaire,alors qu’une centaine de policiers manifestaient sous ses fenêtres : le juge avait même demandé à entendre le prince Albert,goutte d’eau fatale et cause de sa disgrâce.
L’affaire a fait quelque bruit. Neuf magistrats français détachés à Monaco ont dénoncé « les atteintes graves portées à l’indépendance de la justice »,et le Greco a estimé qu’« une telle décision n’est pas de nature à assurer la sérénité de l’exercice indépendant des fonctions de juge détaché à Monaco ». Les aventures du juge Levrault ne s’arrêtent pas là : il s’est vu poursuivre en 2020 par le nouveau garde des sceaux,Eric Dupond-Moretti,pour des propos au sujet de Monaco à la télévision – le Conseil supérieur de la magistrature a cependant estimé,en 2022,qu’il n’avait commis aucune faute. Le ministre,en revanche,qui avait été l’avocat du chef de la police monégasque,a dû s’en expliquer devant la Cour de justice de la République,qui l’a finalement blanchi en novembre 2023.
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