Le bâtiment du Titanic et les grues Harland & Wolff,à Belfast,en Irlande du Nord,le 29 avril 2022. CLODAGH KILCOYNE / REUTERS Les deux gigantesques arches jaunes dominent la ligne d’horizon à Belfast,en Irlande du Nord. Surnommées « Samson et Goliath »,elles servent à soulever les gigantesques pièces utilisées dans la construction de navires sur les chantiers navals Harland & Wolff. Elles sont aussi devenues le symbole d’une entreprise au bord du gouffre.
Fin juin,la société n’est pas parvenue à livrer des comptes audités pour l’année 2023,menant à la suspension de la cotation de son action à la Bourse de Londres. Elle est en effet lourdement endettée et cumule les mauvais résultats. En 2023,elle a réalisé une perte de 43 millions de livres (50,3 millions d’euros),selon ses comptes non audités. En 2022,elle avait déjà perdu 70 millions de livres.
La société,qui emploie 1 500 personnes,espérait se refinancer grâce à un emprunt de 200 millions de livres garanti par l’Etat. Des pourparlers étaient en cours,mais la nouvelle administration travailliste du premier ministre,Keir Starmer,a annoncé fin juillet que l’Etat ne s’en mêlerait pas,évoquant « un risque considérable que l’argent du contribuable soit perdu ».
Ce n’est pas la première fois que Harland & Wolff rencontre des difficultés financières. Créée en 1861 par Edward James Harland et Gustav Wolff,l’entreprise s’est rapidement retrouvée à la tête de l’un des principaux chantiers navals d’Europe. « Elle s’est spécialisée dans la construction de paquebots océaniques,indique Edward Shaw,expert de l’industrie navale à l’université de Liverpool. Elle se trouve notamment à l’origine du Titanic. »
Pour se distinguer de ses compétiteurs,« elle a acquis de nombreuses technologies non éprouvées et des autres chantiers navals,s’endettant lourdement »,raconte-t-il. Cela lui a permis de révolutionner la construction de paquebots,notamment en remplaçant le pont en bois par du fer,une matière plus solide,et en créant des coques à fond plat,dotées d’une capacité plus importante.
Durant la seconde guerre mondiale,la firme a construit une part importante des navires de guerre,tanks et bombardiers de l’armée britannique,y compris le célèbre HMS Belfast,qui a joué un rôle-clé lors du Débarquement. A son apogée,elle employait 35 000 personnes à Belfast,Londres,Liverpool,Glasgow et Southampton. Mais,financièrement,elle n’est jamais vraiment parvenue à sortir la tête de l’eau. « Elle a toujours peiné à repayer ses dettes »,glisse Edward Shaw.
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